(19/01/2012)
La pêche illégale, non déclarée et non réglementée, c’est ce quoi les ivoiriens assistent depuis quelques années. En effet, les eaux ivoiriennes font l’objet de pillages de bateaux clandestins. Cette situation constitue une menace pour l’économie de la Côte d’Ivoire qui sort de 10 ans crise militaro-politique.
La pêche maritime en Côteâ-‘d’Ivoire se pratique sur une superficie de 200 000 km carré et à partir d’un littoral long de 550 km. Des pêcheurs artisans et industriels marins y exercent leur activité. Cependant, celle-ci est menacée par des pratiques de pirateries halieutiques qui détruisent l’écosystème, déstabilisent le socio-système mis en place par les pêcheurs, et portent parfois atteinte à la vie des pêcheurs ou des autorités chargées de la surveillance des côtes.
Cette situation est le fait de navires étrangers battant pavillon de complaisance, mais également de navires de pêche industrielle battant pavillon ivoirien. « Des réactions sporadiques des responsables du secteur halieutique face aux manquements les plus médiatiques ralentissent pendant un moment les activités de pêche illégale, non réglementée et non déclarée, mais celles-ci reprennent de plus belle faute de moyens pour mettre en place une stratégie cohérente de protection de la superficie de pêche maritime et des ressources biologiques qui s’y trouvent. Si une solution n’est pas rapidement trouvée à ce fléau, cela pourrait porter une grave atteinte au développement durable de l’activité de pêche et avoir de ce fait un impact négatif sur la sécurité alimentaire des Ivoiriens », explique, Mme Céline Yolande Koffie-Bikpo de l’Institut de Géographie Tropicale, Université de Cocody.
Selon elle, la pêche maritime en Côteâ-‘d’Ivoire est le fait de la pêche industrielle et de la pêche artisanale. Elle représente 90 % des mises à terre (Direction de la Production Halieutique [DPH], 2008) et se pratique le long de la côte, soit sur 550 km, et dans la Zone Économique Exclusive (ZEE) qui s’étend sur 200 000 kmÂ’.
Cette étendue d’eau a une productivité biologique très variable, liée à la production primaire qui s’y développe. Les estimations des potentiels de pêche annuelle dans ces eaux font état approximativement de 101 000 t, constituées de 1 000 t de crustacés et autres, et de 100 000 t de poissons dont 20 000 t de thons (Bard et Dedo, 1990).
« En faisant abstraction des productions destinées principalement à l’exportation (thons, crevettes et autres crustacés), ce sont environ 80 000 t de poissons qui seraient capturables chaque année pour le marché intérieur et dans les meilleures conditions d’exploitation. Cependant, on remarque une production nationale en dessous de ces possibilité (…) », soutien, l’experte.
La production en baisse
L’invasion des eaux territoriales ivoiriennes par des bâtiments pirates qui ne respectent aucunement la réglementation en vigueur en matière de pratique de pêche mettent en danger la faune aquatique. Avec pour conséquence une baisse quasi-régulière des captures. A telle enseigne que les chiffres de la production nationale ne sont guère reluisants.
Selon les statistiques du ministère ivoirien de la production animale et des ressources halieutiques, de 81.523 tonnes en 2000, la production nationale (tous types de pêche confondus) a chuté drastiquement à 55.261 en 2004 pour une valeur de 21 milliards Fcfa et à 43.531 tonnes en 2005 pour une valeur 19 milliards Fcfa. Soit de 21% en quantité et 19,5% en valeur.
La pêche industrielle prise seule, continue sa plongée avec une capture totale de 16.735 en 2006 contre 34.681 en 2000, soit une régression de 48,25%. Lourdement armés, ces navires pirates constituent une grave menace pour la sûreté nationale.
En 2008, dans leur mémorandum, les armateurs locaux ont stigmatisé l’indolence de la tutelle devant la recrudescence de ces pratiques illégales de pêche, notamment le chalut-boeuf pélagique (chalut tracé par 2 bateaux) et qui détruit les grands fonds marins à travers un pillage systématique.
Bien qu’interdite par la règlementation nationale. Cette technique, selon les opérateurs, est toujours pratiquée par certains bateaux. Cette situation avait même soulevé en 2009 le courroux des marins-pêcheurs qui ont même demandé la démission du ministre e tutelle qui en son temps était M. Alphone Douati.
« De 30.000 caisses par jour il y a des années, nous sommes aujourd’hui pratiquement sans rien. Les embarcations reviennent quasiment bredouilles, cela dure deux ans maintenant. D’ailleurs beaucoup d’armements sont à quai », explique M. Kouassi Yao Barthélémy, secrétaire général du Syndicat des marins-pêcheurs de Côte d’Ivoire.
Déversement en mer des produits chimiques
En plus de la pêche illicite, il y a le déversement en mer des produits chimiques provenant des bateaux.
An 2006, une société pétrolière a déversé en mer de 5.035 m3 du mazout– le pétrole brut qui est un savant mélange d’hydrocarbures est distillé lorsqu’on extrait des nappes liquides existant sous terre. Une fois que ce dernier est traité, il reste un liquide noir et visqueux qui est le mazout –. Or, au niveau international, « lorsque vous atteignez 50 m3, on déclare la catastrophe », soutien M. Kouassi Yao Barthélémy.
Selon lui le mazout est allé se former en dépôt dans les profondeurs maritimes, là où les poissons se reproduisent. Cette catastrophe est également pour quelque chose dans la situation de réduction de production de poisson en haute mer.
La lutte
Avec le nouveau régime en place depuis 2011, les experts pensent que les choses vont bouger dans le bon sens. En effet, le ministre ivoirien des Transports Touré Gaoussou a souligné en octobre de la même année que la Côte d’Ivoire a pris les dispositions nécessaires pour lutter contre la piraterie en mer.
Selon le ministre la stratégie de lutte est basée sur approche sous-régionale et intégrée de gardes-côtes, la mise en place d’un système de recherches et de sauvetage en mer, et l’application du code pour la sécurité des navires.
“Il est impératif d’appliquer les recommandations des états- généraux de la mer qui se sont déroulés à Yamoussoukro (centre)”, a plaidé le ministre.
Mi-septembre 2011 , le gouvernement ivoirien avait organisé les états-généraux de la mer qui ont été sanctionnés par plusieurs recommandations dont la redynamisation du transport maritime et fluvial, la mise en place des moyens humains et matériels devant permettre à l’administration maritime de mieux assurer la sécurité et la sûreté maritime et portuaire, et la mise en oeuvre d’une politique rigoureuse de surveillance des côtés ivoiriennes face aux menaces de pirates qui sévissent dans le Golfe de Guinée.
RAPPORT DE SYNTHESE DES ETATS GENERAUX DE LA MER
I- CONTEXTE ET ORGANISATION DES TRAVAUX
Sous le haut patronage de Son Excellence Monsieur le Président de la République, sous le parrainage de Monsieur le Premier Ministre, Ministre de la Défense et sous la Présidence effective de Monsieur le Ministre des Transports, les Etats Généraux de la mer se sont tenus du 15 au 17 septembre 2011, à la Fondation Félix Houphouët-Boigny pour la Recherche de la Paix, à Yamoussoukro, capitale politique de la Côte d’Ivoire.
La tenue des Etats Généraux de la mer répond du souci du Gouvernement d’inviter l’ensemble des acteurs publics, parapublics et privés du secteur maritime à une réflexion en vue de la formulation d’une nouvelle politique maritime pour l’horizon 2040, de sorte à créer de réelles opportunités d’un développement endogène pour notre pays.
A cet effet, les assises des Etats Généraux de la mer ont vocation à ouvrir la voie à un repositionnement de la Côte d’ivoire comme une puissance maritime dans la sous-région et à lui permettre à nouveau de tirer le maximum de profit de son statut d’Etat côtier.
Aussi les participants à ce forum se sont-ils livrés, au cours de trois journées de travail, à une analyse sans complaisance des maux qui minent la coordination de l’action de l’Etat en mer, la promotion de l’entreprenariat ivoirien, la compétitivité des entreprises de transport maritime et des activités auxiliaires, la sécurité et la sûreté maritimes, les équilibres de l’écosystème marin et lagunaire, le développement optimal du système portuaire, la gestion de la main-d’oeuvre et la mobilisation des capitaux. .
Les travaux se sont déroulés au sein de cinq Commissions organisées comme suit :
Commission I : Administration maritime
Commission II : Valorisation des ressources maritimes et lagunaires
Commission III : Transport maritime et fluvio-lagunaire
Commission IV : Ressources humaines maritimes
COMMISSION V : FINANCEMENT DE LA POLITIQUE MARITIME
Au terme de l’analyse des questions inscrites au programme de travail de ces différentes Commissions, les participants aux Etats Généraux de la Mer ont adopté à l’unanimité les recommandations suivantes.
I- AU TITRE DE L’ADMINISTRATION MARITIME
L’adoption par le Gouvernement du projet de Code Maritime afin de doter le secteur maritime d’un cadre juridique plus approprié ;
La création d’une structure de coordination et de concertation entre les différents départements ministériels intervenant dans le domaine maritime et portuaire qui sera rattaché à la Primature ;
La création d’une structure étatique unique en charge des questions maritimes, conformément à la directive n° 04/2008/CM/UEMOA du 28 mars 2008 de l’UEMOA, portant mise en place dans les pays membres, d’un cadre institutionnel harmonisé du sous secteur maritime. La forme de cette structure, ministère ou secrétariat d’Etat, sera laissée à l’appréciation des autorités compétentes ;
La création d’un armement national et l’ouverture du pavillon ivoirien par la libre immatriculation ;
La conclusion d’accords de coopération maritime avec les pays maritimes émergents ainsi qu’avec les pays membres de l’Organisation pour la Coopération et le Développement Economique (OCDE) ;
La mise en place urgente par l’Administration Maritime d’une structure de recherche et de sauvetage maritime (SAR) ;
L’établissement effectif du réseau régional et sous régional intégré de garde-côtes, dont la Côte d’Ivoire abrite le siège de la zone 2 qui comprend outre notre pays, la Guinée, la Sierra Leone, le Libéria et le Ghana ;
L’adoption par le Gouvernement du plan d’équipement et de formation de la Garde Côtière, en vue du renforcement de la sécurité maritime, et de la sûreté maritime et portuaire.
II- AU TITRE DE LA VALORISATION DES RESSOURCES MARINES ET FLUVIO- LAGUNAIRES
Source : www.AllAfrica.com