
Trafics d’armes, d’êtres humains, d’hydrocarbures, de drogue, dont certains alimentent des réseaux terroristes, piraterie, pêche illicite… À l’ouest de l’Afrique, depuis trois ans, les pays du golfe de Guinée coopèrent pour rétablir la sécurité. Un enjeu stratégique pour la France aussi, qui prête son concours, via Brest et Lorient.
L’information est passée inaperçue l’été dernier. Un capitaine breton (de Landéda), aux commandes d’un navire étranger, a été pris en otage par des pirates au large du Nigeria, le 30 juillet. « Il a finalement été libéré le 19 août suivant », rapporte à Brest, le préfet maritime de l’Atlantique, le vice-amiral d’escadre Emmanuel de Oliveira. Il y a quelques années encore, près de 200 cas annuels de piraterie étaient recensés dans le golfe de Guinée, dont « plus de 80 % au large du seul Nigeria ».
Actes de piraterie divisés par deux
« Depuis que les pays africains de cette zone ont accepté de coopérer, il y a trois ans, les faits ont été divisés par deux », se félicite le préfet maritime de l’Atlantique, qui a la charge des opérations dans le golfe de Guinée. La prise de conscience s’est concrétisée lors du sommet de Yaoundé, au Cameroun, en 2013. Vingt pays de cette région tentent depuis de rétablir la sécurité dans le golfe. Tous les ans, le point est fait lors d’un symposium. C’était le cas il y a quelques jours, à Dakar, d’où le préfet maritime de l’Atlantique vient tout juste de rentrer. « Ces pays sont désormais capables de gérer des interventions en mer. C’est simple, la France n’intervient plus directement depuis 2013 pour les actes de piraterie et de brigandage », explique-t-il, pointant en revanche des problèmes sur la détection, le guidage, la coordination et la communication entre pays de la zone.
L’uranium des centrales… et le poivre du pâté Hénaff
La France apporte son concours, avec d’autres pays européens. Un à deux bateaux, aviso et/ou frégate, de Brest, et un Falcon 50 de la base aéronavale de Lann-Bihoué, sont positionnés en permanence dans la zone. « C’est d’abord pour assurer la sécurité des quelque 80.000 ressortissants français présents dans cette région », pointe le préfet maritime. Dernière évacuation en date : l’an dernier, en Gambie.
D’autres navires et moyens peuvent être activés et déployés, entre 24 heures et cinq jours. La zone est également stratégique pour la France. « 25 % de notre pétrole provient de cette zone. De nombreuses entreprises sont également présentes, dont plusieurs bretonnes (chantiers Piriou qui fournissent notamment des bateaux à ces pays, Hénaff qui y extrait le poivre bio nécessaire à son célèbre pâté…) », illustre Emmanuel de Oliveira. C’est aussi ici que transite l’uranium (Niger) qui alimente les centrales électriques françaises.
Ressource en poissons : urgence vitale
La France veille aussi sur les quelque 3.000 gros navires (dont 60 à 80 battant pavillon français) qui transitent chaque jour dans le golfe.
Pour les vingt pays africains concernés, l’enjeu n’est pas seulement économique. « La pêche illégale (400 chalutiers actuellement) et la pollution ont anéanti la vie marine, et la ressource en poissons, qui représente 70 % des apports en protéines pour les populations. À court terme, si rien n’est fait, celles-ci sont condamnées à mourir de faim », martèle le préfet maritime, qui reste « très pessimiste » sur les enjeux mais « très optimiste sur la prise en charge de ces problèmes par les États africains eux-mêmes ». Prochain bilan dans un an, avec un symposium qui pourrait se dérouler… en Bretagne.
Source: http://www.letelegramme.fr/bretagne/piraterie-une-cooperation-payante-25-09-2017-11676026.php